En Suisse, le recouvrement s’opère par la poursuite pour dettes dont la procédure est réglée dans la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite. L’exécution de décisions qui ne portent pas sur le versement d’une somme d’argent est, en revanche, réglée par une autre loi et suit une procédure différente.
Le recouvrement de créances en Suisse est possible sur la base de la Loi fédérale sur la poursuite pour dette et faillite contre un débiteur domicilié en Suisse ou dont le siège social est en Suisse ou dont le gage garantissant la créance visée est localisé en Suisse.
I – Engagement de la procédure par le commandement de payer
La procédure de recouvrement de créances en droit Suisse présente la particularité de pouvoir être initiée par tout créancier indépendamment de la validité de la créance qu’il prétend avoir à l’encontre de son débiteur.
La procédure de recouvrement de créances en Suisse est menée par des offices administratifs régionaux nommées « Offices des poursuites ». Ces offices n’ont pas de compétence judiciaire ; ils exécutent la procédure de recouvrement sur réquisition du créancier.
La première étape de la procédure consiste en un « commandement de payer » et sa notification au débiteur. Ce n’est rien d’autre qu’une injonction formelle de payer un montant dans un délai donné (20 jours). Il est établi et notifié par l’Office des poursuites compétent. Pour obtenir l’établissement et la notification d’un commandement de payer, il suffit au créancier d’adresser à l’Office des poursuites compétent une réquisition de poursuite, contenant le nom et l’adresse du débiteur, ainsi que le montant de la créance réclamée et le titre de la créance ou la cause de l’obligation.
Dès réception de cette réquisition, l’Office des poursuites saisi notifiera au débiteur poursuivi un commandement de payer portant sur le montant de la créance indiqué dans la réquisition. Les frais afférents à la poursuite sont à la charge du débiteur mais le créancier doit en faire l’avance au moment de la réquisition.
A ce stade, la validité de la créance invoquée par le créancier n’est pas vérifiée par l’Office des poursuites.
La réquisition de poursuite a un effet juridique important : elle interrompt la prescription de la créance visée par la poursuite. L’envoi d’une réquisition de poursuite peut donc être utilisé pour sauvegarder la prescription de droits qui doivent être invoqués à brève échéance (par exemple le droit aux dommages et intérêts dont la prescription est d’une année). Cette démarche permet ainsi de différer le dépôt d’une action judiciaire tout en maintenant une pression sur le débiteur.
II – Opposition au commandement de payer
Corolairement au caractère facilité de l’initiation de la poursuite par le créancier, le débiteur poursuivi a la possibilité de faire opposition au commandement de payer. L’opposition doit être faite dans les 10 jours suivant la réception du commandement de payer. C’est une étape cruciale pour le débiteur qui veut contester la créance pour laquelle il est poursuivi. C’est en effet par le biais de l’opposition au commandement de payer que le débiteur pourra faire examiner par le juge la validité de la créance que le poursuivant allègue à son encontre. Si le débiteur omet de formuler opposition dans le délai imparti, celui-ci est réputé reconnaître la dette pour laquelle il est poursuivi. Dans ce cas, la procédure pourra se continuer, même si la créance alléguée n’est en réalité pas due ou si le titre sur laquelle le créancier se fonde n’est pas valable.
L’opposition au commandement de payer a 2 effets principaux :
- elle suspend la procédure de recouvrement
- elle force le prétendu créancier, s’il veut poursuivre la procédure de recouvrement, à requérir d’une autorité judiciaire la levée de cette opposition (ce qu’on nomme la « mainlevée de l’opposition »)
III – Procédure de mainlevée de l’opposition
C’est au créancier que revient le fardeau de requérir la mainlevée de l’opposition. Le débiteur poursuivi est défendeur.
La procédure de mainlevée a lieu devant un juge, et non devant l’Office des poursuites. Il s’agit d’une procédure contradictoire, sommaire, rapide et peu coûteuse, qui se fonde sur la vraisemblance des titres produits par le créancier et le débiteur. La
La procédure de mainlevée n’est pas un procès au fond, elle a pour seule fonction et pour seule portée d’examiner si le titre produit pat le créancier est valable et si le débiteur est fondé à refuser le paiement du montant exigé.
Le jugement sur mainlevée ne condamne pas le débiteur au paiement d’une somme d’argent, ce jugement ne fait qu’autoriser (ou refuser) la poursuite de la procédure de recouvrement de créance.
Les moyens légaux à disposition du créancier pour faire lever l’opposition dépendent de la nature du titre que celui-ci détient à l’encontre de son débiteur. Plus ce titre constitue une preuve solide du bien-fondé de sa créance, plus l’obtention de la mainlevée de l’opposition sera facilitée et plus seront limitées les possibilités du débiteur d’en contester l’issue.
Ainsi, si le débiteur est au bénéfice d’un jugement exécutoire (suisse ou étranger) ou d’une sentence arbitrale, la mainlevée devra être prononcée par le juge à moins que le débiteur ne démontre immédiatement qu’il s’est déjà acquitté de la dette. En revanche, si le créancier ne détient qu’une reconnaissance de dette écrite et signée par le débiteur, les moyens de contestation à disposition de ce dernier seront plus étendus. Ce dernier pourra notamment introduire un procès au fond pour contester la créance alléguée, ce qui aura pour effet de bloquer la procédure de recouvrement de créance jusqu’à droit connu au fond du litige.
Finalement, si le prétendu créancier n’est pas en possession d’une reconnaissance de dette écrite ou d’un jugement exécutoire prouvant sa créance, il n’aura d’autre choix pour faire l’opposition que d’agir au fond afin d’obtenir un jugement exécutoire condamnant le débiteur au montant réclamé.
IV – Saisie ou faillite
Si le débiteur ne fait pas opposition au commandement de payer dans les 10 jours et qu’il ne s’est pas acquitté de sa dette dans le délai de 20 jours ou si l’opposition est levée par le juge, le créancier peut requérir auprès de l’Office des poursuites la continuation de la procédure de recouvrement.
Après notification du commandement de payer, l’exécution forcée de se continue pas automatiquement, même si le débiteur ne fait pas opposition au commandement de payer, le créancier doit requérir expressément la continuation de la poursuite.
La poursuite se continuera, en règle générale, par voie de faillite lorsque le débiteur est inscrit au registre du commerce en Suisse comme société ou comme associé de certains types de sociétés et dans tous les autres cas, par voie de saisie.
C’est l’Office des poursuites qui opère la saisie des biens appartenant au débiteur. La saisie est effectuée jusqu’à concurrence du montant de la créance poursuivie, y inclus les intérêts et frais liés à la poursuite. Les biens du débiteur ne peuvent être saisis dans la mesure où son minimum vital n’est pas entamé. Tous les biens de première nécessité ne peuvent pas être saisis. Si le débiteur est salarié, ce sont en pratique les créances en salaires qui font l’objet de la saisie, toujours dans la mesure qui excède son minimum vital. Dans ce cas, la saisie a lieu directement auprès de son employeur.
Les biens saisis ne sont jamais la propriété du créancier le poursuivant. La saisie ne confère au saisissant qu’une prétention de droit public à être désintéressé sur le produit de la réalisation des biens saisis. Une fois saisi, les biens sont en effet réalisés par l’Office des poursuites dans le cadre d’une vente aux enchères (ou de gré à gré) et le produit de cette vente est versé au créancier poursuivant.
Si la saisie est infructueuse ou si le produit de la vente ne permet pas de désintéresser le créancier, celui-ci se voit délivrer un acte de défaut de bien. La créance qui est constatée par l’acte de défaut de bien se prescrit par 20 ans. Elle ne porte pas intérêt.
L’acte de défaut de bien pourra être utilisé pour lever une opposition à un commandement de payer dans une procédure de recouvrement de créances subséquente.